Amiante : le diagnostiqueur rattrapé par un diagnostic réalisé en… 1999

Presque vingt ans plus tard, un bureau de contrôle a été condamné par la cour d’appel d’Angers pour un diagnostic amiante erroné.

La vente de ce bâtiment industriel de quelque 3000 m2 remonte à juin 1999. Annexé à l’acte authentique, un diagnostic certifie « l’absence de flocages, de calorifugeages ou d’amiante dans les faux-plafonds ». Quelques travaux sont réalisés, puis les locaux sont loués à un concessionnaire automobile. Quinze ans s’écoulent, et en 2014, à l’occasion d’un renouvellement de bail, un nouveau diagnostic amiante est effectué. Positif cette fois, il révèle la présence de matériaux et produits contenant de l’amiante. Bien que le bâtiment ait été construit en 1984, les analyses sont formelles, l’amiante est présent dans différents flocages.

La machine judiciaire se met en branle, le bureau de contrôle auteur du diagnostic de 1999 est assigné devant le tribunal de grande instance d’Angers. Montant de la réclamation ? Quelque 600 000 euros, tout de même. En première instance, les plaignants se verront toutefois déboutés : si le diagnostiqueur a bel et bien commis une faute dans l’exécution de sa mission, le TGI d’Angers estime que « le dommage constitué par la présence d’amiante par flocage et la nécessité de réaliser des travaux d’évacuation ou de confinement ne constituait pas un préjudice actuel et certain, ni même futur et certain ».

La cour d’appel d’Angers a infirmé le jugement. « S’il est exact que les flocages effectués à compter de 1980 ne devaient plus contenir d’amiante et que le bâtiment litigieux a été édifié en 1984, (la société de diagnostic) indique dans son rapport que le diagnostic visait à rechercher et localiser les flocages, calorifugeages et les faux-plafonds susceptibles de contenir de l’amiante. (…) (Le technicien) a conclu que l’aspect visuel des flocages, calorifugeages et/ou faux-plafonds permettait d’appliquer la notion de « zone homogène » à cet ensemble de locaux ne nécessitant pas de prise d’échantillons en l’absence de doute quant à la présence d’amiante. » La cour d’appel estime que « chargée d’une mission technique lui imposant un minimum de prudence, la société devait à tout le moins émettre des réserves. En évoquant une absence de doute, elle a incontestablement commis par négligence une erreur ».

Même si le désamiantage ne s’impose pas, en l’absence de danger pour la santé et l’environnement, la cour d’appel retient l’impossibilité d’effectuer des travaux ou d’entretenir le bâtiment sans toucher à l’amiante. Et puisque la société acquéreuse a investi dans des locaux dont elle avait l’assurance qu’ils ne contenaient pas d’amiante, la cour d’appel estime que « l’indemnisation du préjudice doit permettre de replacer la victime dans la situation où elle se serait retrouvée si le dommage ne s’était pas produit ». Le bureau de contrôle se voit ainsi condamné à verser 400 000 euros au titre du désamiantage auxquels s’ajoutent 111 000 euros pour les travaux de reconstruction avec de nouveaux matériaux.

Cour d’appel d’Angers, Ch. A, civ., 5 juillet 2018, n°16/01129.

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